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Fini le lit dans les comédies au théâtre

Le journal montréalais Le Bulletin, du 16 octobre 1904, l’un des très rares à paraître le dimanche, perçoit une évolution dans les comédies au théâtre. Plutôt que le lit, on n’en aurait plus désormais que pour la baignoire.

Une révolution s’accomplit en ce moment même, au théâtre, une révolution dont les conséquences seront incalculables… Que se passe-t-il ? La tragédie renaît-elle de ses cendres ? Le mélo a-t-il retrouvé un Frédérick Lemaître et un Anicet Bourgeois ? L’Odéon se transforme-t-il en music-hall ? Un décret de Pons va-t-il supplanter le décret de Moscou ? La vertu cessera-t-elle de triompher à l’Ambigu ?

Mais ce ne serait point là des révolutions. Nous avons mieux que cela, comme chambardement. Voilà la chose en deux mots : la baignoire a remplacé le lit dans les vaudevilles…

Oui, le lit, le fameux lit du second acte, le lit de la demoiselle ou du monsieur de l’entresol, le lit autour duquel galopent de gros bonshommes en caleçon mauve, ce lit traditionnel, classique, a disparu du magasin des accessoires. Ce pauvre lit ! Il était bien fatigué d’avoir tant de fois servi de tremplin — le tremplin de la gloire !— au svelte Germain ou à l’agile Torin, et, vraiment, il n’est pas trop tôt qu’il aille rejoindre, dans le silence et l’oubli, la dague de Venise, la coupe de poison et le manteau couleur de muraille de l’ancien répertoire.

Nous sommes tout à la baignoire. La baignoire va devenir l’accessoire obligé de la mise en scène du deuxième acte. Déjà elle fonctionne dans la «Dame du 23», aux Nouveautés, dans «Madame X…», au Palais Royal… Le voilà bien le triomphe de l’hygiène ! On se baigne, on se lave en plein théâtre, devant le public admiratif… Quel talent chez ces acteurs ! Et le gros monsieur qui se baigne est évidemment plus drôle que le monsieur qui se couche…

Le lit, la baignoire… Le vaudeville nous réserve évidemment d’autres surprises; qui sait où il s’arrêtera sur une pente scabreuse ? Quoi qu’il en soit, félicitons-le d’avoir installé l’hydrothérapie au théâtre. Mieux vaut qu’une douche tombe sur la scène que sur le public…

 

Même si, en 1900, plusieurs comédiens français s’amènent régulièrement jouer à Montréal, et parfois aussi à Québec, on dirait bien que l’hebdomadaire montréalais reprend ici un texte piqué dans la presse française. Qui sait, peut-être que les comédies québécoises en sont toujours au lit et ne sont pas encore passées au bain.

Source de l’illustration, non datée, montrant le Théâtre de l’Odéon à Montréal, manifestement fermé : http://bibnum2.banq.qc.ca/bna/massic/accueil.htm

 

 

 

 

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