La rareté des centenaires en 1900
En 2009, on recensait plus de 1 350 centenaires québécois, pas loin de 5 000 au Canada et plus de 70 000 aux États-Unis. Le centenariat est devenu banal. Voir à ce sujet le blogue du sociologue et gérontologue retraité Richard Lefrançois.
Aujourd’hui, on ne parle à peu près plus dans la presse québécoise, sauf dans des hebdos régionaux, des personnes qui atteignent l’âge de 100 ans. Mais, en 1900, ils sont si rares qu’on est davantage porté à leur donner la parole. Contribution à l’histoire des vieux autrefois.
Le 6 mai 1905, La Patrie nous entretient de l’étonnant Thimothée Collin.
En août prochain, M. Thimothée Collin, de la rue Chomedy, atteindra la cent huitième année de son âge. C’est un allègre vieillard qui sait profiter de la vie mieux que nombre de personnes certainement de beaucoup moins âgées que lui.
M. Collin a déjà fait une promenade en automobile et il fréquente le théâtre. À cent ans, M. Collin allait glisser en traîne sauvage. M. Collin jouit de toutes ses facultés. Il est très robuste et n’a connu la maladie que l’année dernière. Il fut atteint alors par de légères douleurs aux genoux, mais ce n’était pas des rhumatismes, à ce que disait le vieillard. Ces douleurs eurent pour unique résultat de l’empêcher d’assister à la messe tous les jours ; il se contenta pendant cette période de ne se rendre à l’église qu’une fois la semaine, le dimanche.
Le centenaire attire la bénédiction du ciel sur la maison, disent ses enfants.
Né en Irlande, à Cork, en 1797, le jeune Irlandais vint à Montréal en 1815. À cette époque, la ville n’était pas très considérable. Il entra au service des Allan qui à cette époque ne possédaient pas de paquebots. Puis il acheta une terre à Saint-Alban sur laquelle il vécut heureux pendant de nombreuses années.
M. Collin ne prend jamais d’alcools, mais il fume de fréquentes pipes dans le cours de la journée.
Il n’a jamais suivi aucun régime alimentaire et encore aujourd’hui il mange absolument de tout ce qui lui plaît.
Un médecin qui l’a examiné récemment a été émerveillé de son état de santé et de sa vitalité ; il lui a promis de longues années. Depuis douze ans qu’il est venu se fixer à Montréal, il n’a jamais manqué une occasion d’admirer les perfectionnements divers qui ont été apportés dans toutes les branches de l’activité humaine.
Le vieillard se montre enthousiaste de toutes les inventions.
M. Collin raconte volontiers ses souvenirs dont bon nombre sont très intéressants : notamment le grand tremblement de terre qui eut lieu à Montréal en 1819, le ciel noir à midi et il semblait que « c’était la fin du monde ». Puis c’est l’incendie du parlement de Montréal en 1848. La visite du prince de Galles en 1860 est pour lui relativement récente.
Il assista à la première représentation du théâtre Royal qui eut lieu dans la salle du marché Bonsecours. Il y prit naturellement un grand plaisir; mais ce n’était rien à comparer à la représentation à laquelle il assistait en matinée l’hiver dernier.
Malheureusement étant un peu dur d’oreilles, il ne peut suivre très facilement le dialogue, cependant il suit la pièce très bien par la mimique des acteurs.
Très obligeant, travaillant encore à son âge, sortant tous les jours, hiver comme été, il se contente de sourire quand on dit devant lui qu’à soixante ans un homme devrait songer à se retirer de la vie active.
Des précisions s’imposent. En 1819, il ne semble pas qu’il y eut de tremblement de terre à Montréal. L’histoire dit que le 8 novembre, de sombres nuages noirs comme de l’encre descendent plus bas que les flancs du Mont-Royal. Ces « nuages » venaient de grands incendies de forêt dans l’ouest canadien qui assombrissent alors le ciel depuis Kingston, dans le Haut-Canada, jusqu’à Québec. En après-midi, un orage déverse une pluie torrentielle sur Montréal. Le sol est par la suite recouvert d’une sorte de poudre noire, s’apparentant à de la suie. Le lendemain, à midi, le ciel devient si noir que la circulation doit cesser dans les rues. Il faut allumer les bougies dans les maisons et dans les commerces.
D’autre part, l’incendie du « parlement de Montréal » eut lieu en 1849 et non en 1848.
Le gouvernement Harper aimerait bien cet homme qui sourit à l’idée de prendre une retraite à 60 ans!
Croyez-vous ? Personnellement, je suis entouré maintenant de retraités, je baigne maintenant dans des retraités. Et je leur dis et leur répète « Donnez-vous un projet. Gardez-vous en vie. Rusez avec les jours qui passent. Pourquoi ne pas réaliser maintenant ce que vous espériez ? Sinon le vieillissement va rapidement avoir votre peau. »
Mr. Provencher, ce que vous venez d`écrire est un des secrets pour vivre vieux. Pour ma part je ne prendrai jamais ma retraite, j`ai trop vu de gens autour de moi mourir d`ennuie.
Ah, cher monsieur Bastien, je crois vraiment qu’un projet permet de défier le temps.