Sorel, un peu de son histoire
Le 17 juin 1905, le chroniqueur Joseph-Albert Paulhus se lance dans un long texte sur les îles du lac Saint-Pierre, si belles et si particulières. Mais il prend le temps de consacrer tout de même quelques paragraphes à la ville de Sorel, au confluent du fleuve Saint-Laurent et de la rivière Richelieu. Suivons-le.
Sorel est un des plus beaux sites du pays; plusieurs souvenirs historiques s’y rattachent.
La maison William Henry, située sur la rivière Chambly près de l’aqueduc actuel, date de 1742 et fut habitée pendant quelque temps par le duc Albert de Kent, père de la feue reine Victoria. Sur l’extrême pointe formée par la rencontre des bords du Richelieu et du fleuve Saint-Laurent, fut construit le premier pont de la ville. À quelques pas de là, près des quais de la compagnie Richelieu et Ontario, s’élevaient les casernes des Réguliers, démolies récemment.
C’est de cet endroit, le 4 novembre, que les « capots rouges », sous le commandement du colonel Gore, se mirent en marche pour pacifier les rebelles de St-Denis, lors de l’insurrection de 1817. Près de l’église paroissiale d’aujourd’hui, fut abattu, il y a quelques années, un bouquet de pins géants, dont le souvenir est resté fameux. Ce coin de terre fut le théâtre des luttes faméliques des « boutes » de Sorel. C’est à l’ombre de ses arbres séculaires que Jos Montferrand, Jean Vidors, Antoine Bouchelvert se couvrirent de gloire et firent germer dans le cerveau du poète ces vers immortels : … Je suis de Sorel… J’ai le bras mortel…
C’est aussi sur le Richelieu à quelques pas du Pont du chemin de fer de la Rive Sud que Champlain livra son premier combat contre les Iroquois. Les historiens ne sont pas tous d’accord sur l’endroit précis de la bataille. Par la description que Champlain en donne lui-même dans ses mémoires, il aurait traversé le fleuve de l’île St-Ignace à la pointe aux Pères et rencontré les Iroquois à peu de distance de là sur la côte sud de la rivière Richelieu. Or une ligne droite de l’île St-Ignace à la Pointe de Sorel rencontre le Richelieu juste à l’endroit plus haut nommé.
L’étranger qui se propose de visiter les Isles doit nécessairement faire une halte dans la ville de Sorel, c’est le principal centre du district de Richelieu. Les vallées des rivières St-François, Yamaska, Chambly, Pot-au-Beurre qui alimentent son commerce sont des campagnes fertiles, où l’agriculture et l’industrie laitière sont des plus prospères. C’est aussi un centre de navigation. La rivière Chambly offre tous les avantages d’un port sûr, à eau profonde.
C’est là que les compagnies de bateaux à vapeur, Richelieu et Ontario, Sincennes et McNaughton mettent leur flotte en hivernage. Il y a aussi plusieurs chantiers où l’on s’occupe de la construction des navires en général. La ville présente un joli coup d’œil. Les rues sont larges, droites et surtout bien ombragées. Plusieurs édifices comme le nouveau bureau de poste, le collège Mont St-Bernard, le marché St-Laurent, le couvent des dames de la Congrégation, l’hôpital, le collège des Frères de la Cour sont des bâtisses substantielles, et d’un style d’architecture tout à fait à la mode.
Le carré Royal situé en plein centre de la ville est un bijou de verdure et de fraîcheur. Au milieu du parc, un volumineux jet d’eau pleure et déverse ses ondes irrisées par les feux du soleil sur les rebords d’un immense bassin de pierre. C’est le lieu favori pour les promenades sentimentales. Aussi les bancs austiques [sic] qui y sont disposés avec art ont été les témoins de bien des confidences amoureuses. Les soirs d’été, quand les brises tièdes effleurent les fronts, que le vent soupire dans le feuillage, le carré Royal s’anime et revêt le caractère si séduisant du Parc Sohmer de Montréal. Sorel a une population de 10,000 habitants. Les Sorelois sont courtois, hospitaliers et toujours des mieux disposés envers les étrangers qui séjournent en villégiature dans leur ville.
La gravure ci-haut, où Champlain fait le feu contre les Iroquois, est extraite des Œuvres de Champlain, présenté par Georges-Émile Giguère (Montréal, Éditions du Jour, 1973). Contrairement à ce qu’affirme le chroniqueur Paulhus, les historiens s’entendent aujourd’hui pour dire que l’échange armée de Champlain avec les Amérindiens eut lieu non pas à l’embouchure du Richelieu, mais en bordure du lac Champlain, beaucoup plus au sud. Et, dans toute la vie de Champlain, ce fut la seule fois où il fit le feu contre les autochtones.
Ah! Sorel et sa gibelotte …les îles de Sorel, la plus grande héronnière au monde (pourquoi être modeste), les multiples espèces de canards, les chalets sur pilotis, la commune de l’Île de Grâce où les vaches des uns et des autres passent leur été à paître librement…
Ah, vous ne perdez rien pour attendre, chère Sylvie. À un moment donné, je vais échapper des extraits du texte de Paulhus sur ces îles. Mais j’aurais beaucoup aimé m’y rendre auparavant pour y faire quelques images. Malheureusement, la fin de semaine s’annonce pluvieuse. J’y suis déjà allé, sous le soleil, et ça tenait du paradis.
P.S. Je ne cesse de dire aux gens de lire Le Survenant, de Germaine Guèvremont. On peut le trouver en poche pour moins que rien. Et ce livre, tellement bien écrit, baigne dans ce pays généreux.
vrai pour la lecture du Survenant : un grand plaisir.
lors de ma première lecture, il y a une dizaine d années, j avais été très surprise de me retrouver dans un environnement ‘ aquatique ‘ plutôt que terreux. c est que pauvre de moi, l habitant était plus carriole que embarcation.
une fois disons acclimatée, on en redemande. quel plaisir d envier les talents pratiques d angelina un peu mis en arrière-plan de nos jours. pourtant.
oui, un très bon roman qui m a dailleurs incité à visiter cette belle région.
Vous avez tellement raison ! Le Survenant me comble. Et je vous le dis, n’était du temps pluvieux annoncé pour la fin de semaine, j’y serais allé perdre des heures.
Sorel et les 103 îles où on peut imaginer Le Survenant en chaloupe avec le Père Didace chassant le canard ou l’outarde. Encore aujourd’hui, l’automne voit apparaître les caleuses et les chasseurs fins prêts à rapporter le gibier.
Sorel, c’est certes les industries, Marine et QIT mais c’est aussi plusieurs siècles d’histoire depuis sa fondation le 13 août 1642, eh oui! Presqu’aussi vieux que Montréa.
Venez nous voir à la Société historique et visitez notre coin de pays.
Et pour être encore ddavantage imprégné du Survenant, pourquoi ne pas lire la suite? Marie-Didace, la fille de Didace vous enchantera.
bonne lecture et de belles visites. Et si vous avez faim, venez manger la barbotte rôtie avec les oignons vinaigrés sur une bonne grosse tranche de pain de fesse! Ça aussi c’est dans notre histoire.
Vous êtes absolument ADORABLE, chère Madeleine Blanche ! Ça donne envie à bibitte de sauter dans l’auto et d’aller vous voir ! Manger, entre autres, votre barbotte rôtie agrémentée de vos oignons vinaigrés sur votre pain de fesse. Et je voudrais vraiment trouver le moyen d’aller faire quelques images dans les îles.
Je ne connais pas la Marie-Didace. Si c’est aussi bien écrit que Le Survenant, ce doit être une merveille.
Bonjour,
Bonjour Monsieur Provencher,
J’ai découvert votre blog sur Internet, en particulier la page du 1er juin 2012 : « Sorel, un peu de son histoire ». Je voudrais savoir s’il me serait possible d’utiliser l’llustration du Combat de Champlain pour un ouvrage pédagogique. Je travaille sur l’époque où les Basques pratiquaient le commerce des fourrures et cette illustration concerne cette période.
Si cela est possible, je m’engage à signaler votre nom et/ou toute autre indication que vous me préciserez.
Je vous remercie de l’accueil que vous réserverez à ma demande.
Claude LABAT
Cette gravure est du domaine public, cher monsieur Labat. Vous pouvez bien sûr y recourir.
Un simple coup de chapeau me suffirait. Joyeuses Pâques à vous.