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« Monter en amour »

J’ai toujours préféré l’expression «monter en amour» à celle de «tomber en amour» [to fall in love]. Il me semble qu’elle rend avec plus de justesse ce qui se produit alors. Il n’est pas facile de décrire ce moment de vertige qui peut se produire quelques fois dans une vie, ce moment où, sans plus aucune défense, nous ouvrons les bras à la destinée, définie dans le dictionnaire Robert comme cette puissance souveraine considéré comme réglant d’avance tout ce qui doit être, moment où nous sommes prêts à crier Fiat !, Qu’il me soit fait !

Beaucoup d’écrivains s’y sont essayé. J’aime bien le texte d’Henri Michaux (1899-1984) à ce sujet. Je ne sais si vous connaissez ce poète et peintre français d’origine belge, qui a beaucoup écrit, publié surtout chez Gallimard et fait de nombreux voyages, autant en Europe qu’en Amérique et en Asie. Au milieu des années 1950, à l’aide de substances psychotropes et sous le contrôle d’un médecin, il cherche à connaître le développement de la création artistique qui peut naître de l’usage de drogues. Sur internet, vous trouverez beaucoup de références à Michaux.

J’extrais ce texte de Michaux daté de 1950 de son livre Passages, publié à la Nouvelle Revue Française [Gallimard] en 1967.

Chacun est extraordinaire. Il est le seul à s’en apercevoir. Découragement ! Enfin, il finit par s’y faire… puisque personne d’autre que lui ne le remarque.

Mais voilà que dix, quinze ans passent et quelqu’un d’autre, également, le trouve extraordinaire. Merveille. Être aimé. Et l’autre aussi, comme c’est étrange, justement l’autre aussi est extraordinaire, unique, vraiment unique. On n’eût pu l’imaginer… et elle est, naturellement, belle, mais surtout unique, unique.

Amour ! Il est soulagé du poids de sa personne, du poids de sa vie, de ses journées, de ses occupations et soulagé de la propriété à la fin lassante de sa personne.

Quelle merveille ! Qu’est-ce qui ne va pas arriver ? Plus rien n’est impossible. Il atteint sans effort le haut du monde.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Dans la suite, tout d’un coup, ce poète souvent doit apprendre beaucoup de prose…

6 commentaires Publier un commentaire
  1. josee jacinthe #

    … mais voila que dix quinze ans passent et quelqu un…
    ah, ne rien attendre, s offrir d espérer. Contemporain de Michaud, Paul Epoussait une chanson (extrait):

    Dans l amour la vie a toujours
    un coeur léger et renaissant
    rien n y pourra jamais finir
    demain s y allège d hier

    Merci!

    17 janvier 2012
  2. Jean Provencher #

    J’aime beaucoup votre « s’offrir d’espérer ».

    Dites ? je ne connais pas cet homme, non plus que cette chanson.

    17 janvier 2012
  3. Pierre Robitaille #

    Aaahhhhh! Que ça rend le coeur léger!
    Décidément cher Jean, vos chroniques ont un effet addictif incroyable. Je réserve souvent ma meilleure gorgée de café matinale, la deuxième, la première ne servant qu’à redonner raison d’exister à mes papilles gustatives, à la lecture de votre article du jour.
    Celle d’aujourd’hui a quelque chose de délicieusement suranné et la photo qui l’illustre démarre un rouleau de cire dans ma tête avec une vieille chanson d’amour de Madame Fréhel.
    Pendant les fêtes, mon cousin nous a fait parvenir une recueil de poésie que ma grand-mère Bernadette avait commencé à écrire. Amorcé à l’école alors qu’elle avait quatorze ans, elle l’a tenue jusqu’à la vingtaine et on y est témoin de la naissance de ses émois amoureux; d’abord avec un certain Georges où on perçoit la fougue de l’amour adolescent
    et enfin sa rencontre avec Emmanuel mon grand-père où la promesse d’un bonheur futur
    est plus tempérée mais non moins puissante.
    Bien sûr, c’est plein de bienheureuse naïveté où les mots bonheur, coeur, amour, toujours ont la place d’honneur mais il s’y cache quelques perles dont celle-ci:

    «Hélas, je n’ose vous aimez en rêve car alors vers vous mon regard se lève et c’est de si haut sur moi que s’incline vos yeux!»
    Bernadette Langlois, (env.18 ans)
    Voilà…Mon Grand-père et Bernadette furent tendrement amoureux pendant plus de cinquante ans et eurent 11 enfants et 36 petits enfants. Mon grand-père a été, livreur chez Boswell, vendeur d’assurances (fort peu longtemps) et finalement boucher.
    Bonne journée Jean!

    17 janvier 2012
  4. Jean Provencher #

    Ô, merci beaucoup, cher Pierre !!!

    Et puis, je vais te dire, tu es bien chanceux d’avoir copie du recueil de poésie de ta belle Bernadette. Prends-en bien soin. Et j’aime savoir qu’elle se retrouve ici, ce matin, avec nous.

    17 janvier 2012
  5. Une lectrice #

    Vous faites ma journée… merci.

    17 janvier 2012
  6. josee jacinthe #

    oui, désolée – clavier mûr pour la retraite… On aurait dû lire Paul Eluard (derniers poèmes d amour).

    et, j ai bien apprécié lire Monsieur Robitaille – votre Bernadette semblait bien éprise !

    jj

    .

    18 janvier 2012

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