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Cessez ces baisers !

Au début du 20e siècle, la tuberculose, une maladie bien ancienne, qui remonte à la préhistoire, fait des ravages. À l’automne 1905, un grand congrès à ce sujet se tient à Paris. Là, on constate que le mal n’est pas héréditaire, contrairement à ce qu’on avait toujours cru, et que le meilleur moyen de l’attraper est d’embrasser un tuberculeux.

Le 21 octobre 1905, dans l’Album universel, le chroniqueur A. Beauchamp ouvre son propos de la semaine avec le texte suivant :

Le baiser est un échange mutuel de microbes !

Cette définition n’est pas poétique, mais elle porte un tel cachet d’actualité, que je n’hésite pas à l’énoncer. Au grand congrès médical international, qui vient de se terminer à Paris, il a été, en effet, admis que la tuberculose n’est pas héréditaire, mais qu’elle est éminemment contagieuse; que les moyens de transmission du mal sont multiples et que la meilleure manière de combattre le fléau est de se prémunir contre les dangers de la contagion.

Jusqu’ici la lutte s’était faite rationnelle, la société toute entière travaillant à dépister la terrible maladie et la science faisant une guerre sans trêve aux causes d’où découle la tuberculose, mais le congrès de Paris a fixé les méthodes, rejeté les théories anciennes et en a adopté de nouvelles et de positives.

C’est ainsi que nos savants ont énoncé le baiser comme l’ennemi de la société moderne, un échange de microbes, le propagateur par excellence de la tuberculose, renversant du coup des siècles d’idéal et de poésie.

Le baiser n’est pas un mal en soi, certes, et les savants ne vont pas si loin, mais comme la pièce d’or, que l’on échange de main en main, porte avec elle des germes pernicieux, ainsi le baiser, qui est comme la monnaie courante de l’amitié, porte avec lui la mort.

En garde donc contre le baiser ! Dorénavant embrasser sa sœur ou sa mère sera considéré comme un attentat à la sécurité publique !

Comme tout change ! Qui se serait douté que le baiser, si doux aux disciples de Roméo, deviendrait une calamité ?

Hélas, les microbes ne respectent rien.

Tout est bon pour la propagation de la subtile et épuisante maladie, l’incessante pourvoyeuse de tristesses, la tuberculose, que nos savants et nos philanthropes ont juré de terrasser à tout prix.

 

Mais la bataille contre la tuberculose est loin d’être gagnée. Au Québec, la lutte durera jusqu’au début des années 1960. À un moment donné, on multipliera les sanatoriums loin des villes. Et les tuberculeux seront souvent victimes de rejet.

6 commentaires Publier un commentaire
  1. sylvie pontbriand #

    Eh! Oui et dans les années 70 il existait encore un sanatorium à Ste-Agathe destinés aux inuits. Et qui se souvient que l’hôpital actuel de Ste-Agathe-desMonts est l’ancien sanatorium ? L’air frais faisait parti du traitement.

    12 octobre 2012
  2. Jean Provencher #

    Absolument. Ces sanatoriums, on les plaçait loin des villes.

    12 octobre 2012
  3. Nicole D. #

    Vous connaissez certainement le sanatorium Bégin tout en haut de la côte, au lac Etchemin. Transformé maintenant en CSSS. La vue de ses chambres est magnifique tournée vers le mont Orignal et sur le lac. Malheureusement avec les transports aériens la tuberculose tend à revenir en force, le bacille est beaucoup plus résistant. En Chine plusieurs personnes chaque année en sont atteintes. Le vaccin sera-t-il de retour dans les écoles comme dans notre jeune temps, dans les années cinquante ?
    Bon automne Jean ! Prenez garde aux gouttelettes… de toutes sortes !

    12 octobre 2012
  4. Jean Provencher #

    Le sanatorium Bégin est fort connu dans le région de Québec.
    Bel automne à vous, chère Nicole.

    12 octobre 2012
  5. josee jacinthe #

    ma mère était de Montmagny, lieu où a particulièrement sévi la terrible maladie; des membres de sa famille en furent atteints et le sanatorium visité. c était la vraie Pagaille ! j ai encore en mémoire ses récits des mesures prises au quotidien pour tenter d éviter la propagation – souvent inutilement. ma mère , la plus jeune, heureusement épargnée.

    13 octobre 2012
  6. Jean Provencher #

    Je n’ai jamais visité, chère Vous, de sanatorium et, par bonheur, il ne semble pas y avoir eu de tuberculose dans ma famille proche.

    13 octobre 2012

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