Le temps de la dinde
La dinde est le traditionnel accompagnement des dîners de Noël au Canada comme aux États-Unis. Sans être aussi scrupuleux observateurs que leurs concitoyens de langue anglaise, les Canadiens-Français aiment aussi voir trôner sur leur table un de ces volatiles. Malheureusement, depuis quelques années, les dindes se font plus rares.
— Est-ce un signe de progrès. Évidemment non, puisque le prix de ces symboles de la bêtise s’est élevé en proportion de leur rareté, ce qui prouve bien que l’on continue d’en faire grand cas.
L’achat de la dinde de Noël est donc le grand problème économique de l’heure présente. Nos bonnes ménagères sont beaucoup plus inquiètes de savoir si le prix en sera augmenté qu’elles ne se soucient des changements que Monsieur [William Stevens] Fielding projette à son tarif.
Jubilez, braves dames : les prix seront plus bas cette année. Les oiseaux de choix se détailleront couramment de dix-sept à dix-huit cents la livre. On en trouvera aussi à quinze chez d’«honnestes» marchands. Mais méfiez-vous des dindes à treize cents. Le chiffre pourrait bien être fatal pour vos dents.
Les dindes se vendaient dix-neuf et même vingt cents à cette saison-ci l’an dernier. Les expéditeurs de l’Ouest avaient été en retard dans leur envoi et il s’ensuivit un encombrement du marché pendant la semaine de Noël, au point de faire baisser le prix maximum des dindes à dix-sept cents la livre, ce qui est jugé scandaleusement bas par la plupart des marchands.
Cette année, les envois ont été faits à temps et le marché est actuellement normal. L’offre dépasse peut-être un peu la demande, mais d’ici quelques jours, les conditions seront renversées ou au moins égalisées.
La plus grande partie des dindes consommées à Montréal viennent de l’ouest de l’Ontario.
La Patrie (Montréal), 14 décembre 1906.
