Parlons plantes médicinales
Au fil du temps, me semble-t-il, on a toujours montré un grand intérêt pour les plantes médicinales.
Mais, souvent, dans les écrits, lorsqu’on en parle, on ne donne aucune référence sérieuse à son propos. On se contente d’y aller de formules vagues, comme Selon les dires des anciens… Depuis 30 ou 40 ans, un certain nombre de livres sont parus au Québec sur le sujet, mais beaucoup d’auteurs nous demandent de faire un acte de foi.
Or, l’historien sérieux ne peut se permettre de citer des ouvrages basés sur des affirmations bien floues. Il nous faut une référence précise. C’est la raison pour laquelle, dans mon ouvrage Les Quatre Saisons dans la vallée du Saint-Laurent, je ne parle pas beaucoup de plantes médicinales. À l’occasion de mes recherches pour ce livre, j’ai bien trouvé des mentions d’usage médicinal de plantes d’ici, mais la plupart n’étaient jamais attestées, ne reposaient jamais malheureusement sur une référence précise. Je ne pouvais perpétuer ce flou.
Dans l’hebdomadaire Le Sorellois, du 13 octobre 1899, je serais porté à accorder foi au passage suivant. Nous sommes au marché de Sorel, à la mi-octobre. Le journaliste écrit :
Notre marché, samedi dernier, était assez bien approvisionné, mais les prix de quelques articles sont un peu augmentés, entre autres le beurre, qui se vend de 22 à 24 cts la livre.
Une chose que l’on remarque sur notre marché, ce sont les herbages de tous genres, qui servent à faire de bonnes tisanes de famille, pour guérir les rhumes, les dérangements d’estomac, les diarrhées, la constipation, etc.
On voit souvent en quantité la savoyanne, comme on appelle cette petite racine jaunâtre qui est infaillible pour le mal de lèvres, autrement dit le feu sauvage, le chiendent, la réglisse, le thim [sic], la peppermint, la belle angélique et le stormatum, que nos bonnes femmes de cultivateurs appellent la racine d’estomac d’homme, qui, en effet, en tisane, est bon, non seulement pour les estomacs d’hommes, mais aussi pour ceux de femmes.
Il se fait ainsi à l’automne une grande vente de ces racinages très précieux et qui permettent à beaucoup de familles d’éviter la note du médecin.
Ce pourquoi je serais porté à attacher foi à ce texte, c’est que ce journaliste, visitant un marché public, est l’un des très rares dans la presse québécoise du début du 20e siècle à nous entretenir des plantes médicinales qui s’y trouvent. Et, non seulement il montre un intérêt pour la chose, mais il nous laisse croire, me semble-t-il qu’il s’y connaît.
Allez, je vous laisse ce texte pour ce qu’il est. Et votre opinion vaut bien la mienne.