Mon abeille attachante a laissé sa vie dans l’arche
Venue de je ne sais où, solitaire n’appartenant pas aux siennes, elle est arrivée voilà plusieurs jours, et a choisi l’endroit comme son lieu de vie.
Elle était fascinée par l’abreuvoir d’oiseaux et l’eau de mon puits que j’y mettais. Je l’avais réchappée légèrement, il y a quelques jours, la voyant, flottant immobile, dans l’eau. Mais elle n’a pas survécu.
Je l’ai prise avec grande précaution, la plaçant au cœur de son linceul fait de quatre épaisseurs d’essuie-tout, petit lieu coussiné. J’ai choisi de la mettre en terre tout à côté de l’abreuvoir, là, où le 3 octobre encore, elle butinait, toute minuscule, dans une fleur jaune aussi petite qu’elle.
J’ai pris beaucoup plaisir à sa présence. J’aimais être convaincu que son comportement, sa manière d’être, faisait de nous deux des complices de vie dans la solitude et la beauté simple de ce lieu lointain.
Impatiente, elle me tournait autour lorsque je nettoyais l’abreuvoir et en changeais l’eau, mais jamais ne m’a attaqué. Je lui parlais.
J’ai donc creusé à la pelle ronde le lieu de son repos. Une simple grosse motte mise de côté pour ouvrir la terre. Puis, venant chercher sur la galerie avant le petit linceul qui la contenait, quelle surprise ! Une abeille inconnue s’y était posée, immobile, tout à côté. Je lui ai dit que je la lui laissais pour une trentaine de minutes, et viendrait en prendre possession par la suite.
Revenu plus tard, l’abeille accompagnatrice était toujours là. Toujours au même endroit. Sans avoir bougé. On aurait dit qu’elle la veillait. Arrive-t-il qu’une abeille en veille soudain une autre ? Alors, doucement, j’ai pris l’attachante pour aller la porter en terre.
Retournant à la galerie, l’accompagnatrice était disparue. Peut-être sans plus de raison d’être là.
Et puis le soleil se montrait ainsi dans l’eau de l’abreuvoir après l’enfouissement de l’attachante. La mort avait des couleurs de rose.
Étrangement, une grande paix intérieure m’habitait.
Il aura été dit qu’une petite abeille, bien attachante, repose dans ce lieu qu’elle a elle-même choisi.
Elle repose en paix. Dans la douceur. Merci d’avoir illustré ainsi sa fin de vie et sa sépulture…
Merci beaucoup. Je voulais grand soin pour cette petite bête de rien à la vie bien courte.