La naissance de La Marseillaise
Le Canadien, quotidien de Québec, édition du 17 septembre 1884, fait sa une avec ce texte.
L’Hymne des Marseillais ou La Marseillaise a une étrange destinée; hymne guerrier, patriotique, à l’origine, puis révolutionnaire, tantôt toléré, tantôt proscrit, est redevenu l’hymne national officiel.
Le ministre de la guerre, par sa circulaire du 24 février 1879, a prescrit de se conformer au décret de loi du 26 messidor an III (14 juillet 1795), qui dit que le morceau de musique intitulé Hymne des Marseillais sera exécuté par les musiques militaires. Ce chant national, qui a immortalisé son auteur, un capitaine du génie, a une origine qu’il est intéressant de rappeler.
Lorsqu’au mois d’avril 1792 arriva à Strasbourg la nouvelle déclaration de guerre contre l’Autriche, le maire de cette ville, Dietrich, réunit à sa table, le 24 avril, les volontaires qui étaient sur le point de partir. Parmi les convives, se trouvait un jeune capitaine du génie, un ami de la maison, nommé Rouget de L’Isle. Pendant le repas, le maire patriote parla de la nécessité d’avoir un chant de guerre pour exciter l’enthousiasme des soldats et remplacer les vieux refrains de route et des chambrées.
— Voyons, Rouget, dit-il en s’adressant au jeune officier, vous êtes poète et musicien, faites-nous quelque chose qui mérite d’être chanté.
Rouget s’en défendit d’abord; mais excité par les instances de ces camarades, en proie à l’état d’exaltation et de fièvre guerrière que provoquait alors la grandeur des événements, il se retira dans sa chambre, prit son violon, et composa les paroles et la musique de l’hymne qui devait immortaliser son nom.
Le lendemain, 25 avril, sept heures du matin, écrit Masclet, officier d’état-major qui assistait à la réunion chez le citoyen Dietrich, Rouget de L’Isle était chez moi :
— La proposition de Dietrich, me dit-il, m’a empêché de dormir, j’ai employé la nuit à essayer une ébauche de son chant de guerre, même de la mettre en musique; lis et dis-moi ce que tu en penses.
Je lus avec admiration et j’entendis avec enthousiasme le chant de guerre tel qu’il existe aujourd’hui, à l’exception de deux vers de la dernière strophe, qui furent remplacés par deux autres.
Quelques heures après, Rouget de L’Isle se rendit chez Dietrich; et là, accompagné sur le piano par une des jeunes filles présentes chez le maire, il exécuta son chant de guerre.
Ce fut, dit Masclet, comme un éclair du ciel; tout le monde fut saisi, ravi, tous le savaient, tous le chantèrent, tout Strasbourg, toute la France.
Le tableau montrant Rouget de L’Isle chantant La Marseillaise à Strasbourg, d’Isidore Pils (1813-1875), conservé au Musée historique de Strasbourg, apparaît sur la page Wikipédia consacrée à l’hymne national de la France.