Pourquoi pas les Cantons de l’est ?
À la fin des années 1880, certaines régions de colonisation s’offrent à la famille qui veut demeurer au Québec plutôt que déménager en Nouvelle-Angleterre. Elle peut gagner le Nord de Montréal, par exemple, le Témiscamingue, le Lac-Saint-Jean, l’arrière-pays de la Côte-du-Sud et du Bas-Saint-Laurent, même bientôt la Mauricie. Et le gouvernement québécois a mis de l’avant une politique pour faciliter la démarche.
Mais pourquoi pas les Cantons de l’est ? L’agent de colonisation J.-F. Bélisle, qui habite Coaticook, tout près de la frontière avec les États-Unis, écrit au Franco-Canadian pour vanter le plaisir de vivre dans cette région. Mais, manifestement, il n’est pas facile pour lui d’écrire. Le journal publie sa lettre le 5 avril 1889.
Les Cantons de l’est ne sont pas assez connus. Les terres sont excessivement fertiles, les pouvoirs d’eau abondants, l’agriculture et l’industrie sont florissantes. Les terres sont moins chères que dans les vieilles paroisses et elles sont plus fécondes. Le sol est très riche dans les Cantons de Barnston, Compton, Stanstead, Barford, près de la ville de Coaticook.
Ces terres offrent de grands avantages aux cultivateurs des vieilles paroisses qui n’ont pas assez de terres pour établir leurs enfants. Avec le prix de leur terre, ils pourraient acheter dans ces Cantons d’immenses terrains qui sont d’une grande fertilité. Tous les cultivateurs sont riches dans ces endroits. Ils ont adopté un mode de culture que nous considérons supérieur à celui qui prévaut dans les vieilles paroisses. Là, on cultive pour vendre le grain, mais, dans les Cantons de l’Est, on fait l’élevage des animaux en grand. L’expérience démontre que le cultivateur a plus de profit à élever des animaux pour le marché qu’à semer le grain pour le vendre. C’est le mode de culture qui fait la richesse dans les Cantons de l’Est.
Toutes les terres sont en partie défrichées dans les Cantons. Il y a aussi un bon commerce de foin et plusieurs fromageries. Les terrains étant presque partout accidentés, il n’y a ni fosses ni rigoles à faire. On peut acheter dans ces Cantons des terres d’une égale étendue pour un prix moindre que dans les vieilles paroisses par lot de 75, 100, 150 acres ainsi de suite jusqu’à 600 acres, qui se tiennent ensemble bien bâties ayant vergers, sucreries, etc., etc., les prix variant depuis $600 à $5,000, suivant les améliorations, la grandeur des terres et la proximité des villes et villages, et du marché, etc.
Encore une fois, M. le Rédacteur, nous faisons un patriotique et sincère appel à ceux des cultivateurs des vieilles paroisses qui sentent le besoin de se déplacer ou de bien établir leurs enfants, et même à nos compatriotes des États-Unis désireux d’utiliser leurs épargnes, de ne pas hésiter de venir essayer les Cantons de l’Est. Ne sortons pas de la province pour courir après une fortune qui est si près de nous.
Merci, M. le Rédacteur, de m’avoir fait l’honneur d’insérer cette humble correspondance dans les colonnes de votre journal. Puisse-t-elle intéresser quelques-uns de vos lecteurs et servir en même temps à la bonne cause de la colonisation de cette partie des Cantons de l’Est qui n’est peut-être pas assez connue.
Votre tout dévoué serviteur.
J. F. Bélisle
Agent de colonisation
Coaticook, P. Q.