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Pour une nouvelle histoire de Québec (1/3)

L’escalier Casse-cou

Le samedi 13 octobre, dans l’arrondissement Sainte-Foy—Sillery—Cap-Rouge, se tenait le premier salon des 13 sociétés d’histoire de la ville de Québec. J’ai eu le grand plaisir d’ouvrir cette journée avec une conférence sur le thème «Où s’en va l’histoire ?». Proposer de nouvelles approches de l’histoire de Québec, l’une des premières villes au nord du Mexique.

Voici l’aide-mémoire que je m’étais préparé pour la circonstance. Je l’échappe ici, sur ce site, en trois jours — aujourd’hui, demain et jeudi — car le texte serait trop long autrement.

Je vous préviens, c’est syncopé.

 

Avertissement d’abord, chers amis.
Ne prenez rien de personnel dans ce que je vais dire.
Et je ne veux absolument pas cracher dans la soupe, ni mordre la main qui m’a nourri.

Vous savez, je ne suis pas d’un naturel inquiet, mais je me questionne.

Où s’en va l’histoire ?

Je pose la question, parce qu’il me semble que nous sommes au Québec enfermés dans un ronron.
Des jours, des années même que je me dis que nous tournons comme un hamster dans notre roulette et nous ne nous posons même pas la question « Où ça mène ce que nous faisons en histoire, nos approches des choses ? »
Je ne nous sens plus du tout audacieux.
Et depuis longtemps.
Pas du tout prêts à de nouveaux sujets, prêts à imaginer des nouveautés pour rejoindre plus de monde.
Parce que l’intérêt pour l’histoire, dans l’ensemble de la population, continue d’être là. C’est nous qui n’y sommes plus.
Je sors d’une soixantaine de rencontres dans les régions de Québec et de Chaudière-Appalaches;
l’appétit des gens pour l’histoire est incroyable.
Et je poursuis ma route.

Parfois, je nous trouve même désespérants.
Cette année encore, au Québec, la majorité des ouvrages en histoire qui paraîtront seront des livres reliés à des personnages politiques, et à des hommes politiques.
Les rares émissions de télé sont de la même eau.
Nous sommes demeurés au temps de l’abbé Groulx, il y a 70 ans.
Dieu que c’est ennuyant !
Les femmes nous sauvent en partie.
Les historiennes Micheline Lachance, Marie-Aimée Cliche, Suzanne Marchand, par exemple, n’ont aucune envie de nourrir notre ronron pour l’histoire des hommes politiques.

Écoutez, je brasse le jeu de cartes.
Plutôt qu’une histoire toujours pareille à elle-même, linéaire la plupart du temps, d’une histoire «réchauffée» aussi comme une vieille soupe sur le feu,
j’ai envie d’une histoire buissonnière, au sens où on disait à l’époque faire l’école buissonnière.

La nouvelle histoire en France remonte à 40 ans.
Où sont donc chez nous, maintenant, les historiens semblables à ces as français de la nouvelle histoire, les Fernand Braudel, les Emmanuel Leroy-Ladurie, les Philippe Ariès ?
Jamais apparus, il faut bien le constater.
Comment se fait-il ?

Pourquoi pas alors de nouvelles approches, de nouvelles pistes,
un nouvel éclairage de notre histoire à nous, dans la région de Québec ?
Cette histoire est tellement riche.
Je change de bord la lorgnette.
Je propose des avenues,
mais vous pouvez en avoir d’aussi intéressantes.

* * * * *

L’histoire de nos joies, et tant qu’à faire l’histoire de nos peines.
Textes de joie, textes de peine.
C’est assez incroyable tout ce qu’on pourrait raccrocher.

Quelques-unes de nos joies ?
Le retour régulier de l’éperlan, deux fois par année, et le délice qu’il est, courir le mardi-gras rue Saint-Joseph, j’ai 2 000 jeunes qui défilent costumés en 1900, où même les chevaux portent le haut-de-forme et des pantalons multicolores, le marché de Pâques, l’arrivée de la lumière en 1887, le bonheur de la Terrasse Dufferin.

Quelques-unes de nos peines ?
La première sans doute : le 25 décembre 1635, lorsque nous perdons notre père, Samuel de Champlain, le fondateur. Notre Noël le plus triste en 400 ans d’histoire.
Place-Royale rasée par le feu en 1682.
Les 30 premières années du 18e siècle, peuplées de grandes famines et de grandes épidémies. Jamais début de siècle ne fut si triste.
L’automne de 1759 après la bataille des Plaines d’Abraham, ses nombreux blessés français, anglais et amérindiens dans la ville, au moment où le Régime français se termine dans la corruption et la gabegie, avec l’intendant François Bigot et sa bande, et le rude hiver qui arrive bien tôt. À brailler. Pour tout le monde à Québec. Immense passage à vide.
Je ne voudrais pas y avoir été.
De grands incendies, fort fréquents, au 19e siècle, qui vont nous obliger à la mise en place d’un aqueduc et la formation d’un corps de pompiers.

 

La suite ? Demain.

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