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Une histoire de petits saints Jean

Durant les années 1870, pour varier encore plus les défilés de la Saint-Jean au Québec, on imagine le procédé du char allégorique à l’image de ce qui se fait en Europe, mais en lui donnant une saveur locale.

Lors de la décennie suivante, on pense à personnifier saint Jean-Baptiste par un jeune enfant aux cheveux bouclés souriant à la foule. Or, la trouvaille plaît tant qu’on décide bientôt qu’apparaîtront plusieurs saints Jean-Baptiste dans chaque défilé.

Pour celui de 1886, nul doute que le journaliste du quotidien Le Canadien à Québec en conservera longtemps un magnifique souvenir.

La journée de vendredi remplira certainement une des plus belles pages des annales de la société St. Jean-Baptiste à Québec. Si le temps était sombre, la joie la plus vive et le patriotisme le plus ardent n’en brillaient pas moins au fond du cœur de tous nos compatriotes, et la démonstration grandiose sur l’organisation de laquelle nous félicitons si chaudement les sociétés de St. Sauveur [une petite ville qui sera sous peu annexée à Québec] et de cette ville laissera parmi notre population en général un souvenir ineffaçable.

Pour la suite de son article, le journaliste prévient qu’il se bornera « à relever les particularités les plus saillantes de la procession qui ne figuraient pas sur le programme ».

Et disons d’abord que la température qui était menaçante depuis trois jours a été encore très clémente hier et qu’elle a même poussé la condescendance jusqu’à nous gratifier, au début de la fête, d’un petit orage tout juste suffisant pour abattre la poussière.

Cela a un peu retardé le départ de la procession, mais on n’en était pas fâché, attendu que la marche était d’autant moins fatigante que le soleil brillait par son absence et que les rues étaient d’une propreté remarquable.

Puis le journaliste souligne que, durant le défilé, il y avait « une foule énorme formant partout une double haie de laquelle s’élançaient de patriotiques exclamations ».

Et voyons comment l’auteur s’attache aux nombreux petits saints Jean-Baptiste :

Nous avons remarqué cette année encore, dans les rangs de la section St Roch, ce charmant petit bonhomme, enfant de M. Frs. Guillaume, mouleur français établi à Québec, qui personnifie si bien le petit St-Jean, et qui, dans son costume primitif, fait allègrement tout le trajet à pied, tenant en laisse un agneau à la toison d’une blancheur immaculée. […]

La section  St-Jean [sans doute celle du faubourg Saint-Jean] était nombreuse et très bien organisée. Le cercle St. Jean-Baptiste, qui en faisait partie, avait vêtu en petit St. Jean l’enfant de M. O. Robitaille, messager en chef du Palais législatif. […]

Le défilé se poursuit. Et voici que, dans Saint-Sauveur, apparaît un autre petit saint Jean. Le journaliste le décrit ainsi :

 Un détail qui vaut la peine d’être mentionné, c’est le charmant petit St. Jean qui, du haut d’une fenêtre de la rue Bayard, envoyait gracieusement des baisers à la foule qui passait.

Finalement, on en était venu rapidement à tant aimer les petits saints Jean qu’on les multipliait, ce qui obligera en 1902 la Société Saint-Jean-Baptiste à passer un règlement défendant la présence de plus d’un saint Jean-Baptiste à l’intérieur d’un même défilé.

 

Le Canadien (Québec), 28 juin 1886.

Sur la photographie, on voit le petit saint Jean-Baptiste dans la parade de la Saint-Jean qui se tient à Saint-Raymond le 25 juin 1950. La photographie est déposée à la Bibliothèque et Archives nationales du Québec à Québec, Fonds Paul-Émile Duplain, Événements populaires et sportifs, cote : P322,S3,D1-5.

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