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Bonne fête nationale, chères Irlandaises, chers Irlandais (17 mars)

Retour en 1904.

Elle est bien calme, bien tranquille de ce temps-ci, notre vieille capitale.

À peine commence-t-elle à se réveiller, sous les baisers encore tièdes du soleil printanier et le reporter a fort à faire pour remplir son carnet et satisfaire la curiosité du lecteur, avide de nouvelles à sensation.

Mais, avec le retour du printemps, l’arrivée de la verdure et des lilas, Québec va ressusciter et la vie commerciale, l’activité fébrile du port et de ses travailleurs vont nous apporter un regain d’incidents, une source nouvelle où nous irons puiser à pleines mains.

L’événement capital de la semaine, et qui a donné lieu à une fort jolie démonstration, les Irlandais nous l’ont fourni par la célébration de leur fête nationale.

Ces braves Irlandais ! À les voir, jeudi dernier, parader dans nos rues, drapeaux et musique en tête, qui aurait reconnu en eux ces pauvres émigrants de 1832, chassés de leur infortunée patrie, comme de vils esclaves et venant demander, au peuple canadien, une hospitalité que nous leur accordâmes de grand cœur.

Ils s’entassèrent tous dans les masures de la rue Champlain et de la rue Sault-au-Matelot, et Dieu seul connaît toutes les privations que ces malheureux exilés eurent à souffrir, pauvres et abandonnés qu’ils étaient, étrangers dans une ville française, au sein d’une population que leur misérable état rendait un peu craintive.

Mais, avec les années, les choses s’améliorèrent. Les bannis d’hier prirent conscience d’eux-mêmes, adoptèrent chacun l’industrie qui leur allait le mieux, et aujourd’hui la population irlandaise de Québec est estimée des citoyens anglais et français. Tout dernièrement encore, nous avons salué avec plaisir l’élection de l’un des leurs à la charge éminente de trésorier de la province.

Un petit peu querelleurs, les Irlandais n’ont pas toujours fait bon ménage avec les Canadiens-français, batailleurs eux aussi, et fiers à juste titre de leur droit de cité. Mais ces petits différends, qui prenaient naissance au choc des caractères hétérogènes, n’étaient que superficiels et si, aux États-Unis, il y a séparation nettement accentuée entre l’élément irlandais et la race canadienne-française, cette anomalie-là n’existe pas chez nous. Car le Canadien-français, loyal et généreux, hospitalier surtout, aime à reconnaître les qualités chez son concitoyen de l’Hibernie et à les respecter.

 

Le Canada (Montréal), 19 mars 1904. L’article est de Paul Boyer, le chroniqueur du quotidien montréalais à Québec.

La photographie de l’Irlandaise heureuse ci-haut fut prise lors du défilé de la Saint-Patrick de Québec le 26 mars 2011, rue Cartier, dans le quartier Montcalm.

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