Skip to content

Le journaliste Godfroy Langlois secoue le monde de l’éducation au Québec

Pour son temps, manifestement, cet homme y allait d’une grande clairvoyance.

Faisant une revue brève, mais documentée, de la situation intellectuelle de la race canadienne-française, dans cette province, M. Langlois en vient à cette conclusion que les Canadiens-français sont bien loin d’occuper, dans le commerce, la finance et l’industrie, toute la place qu’ils devraient.

« Des avocats, des docteurs, des notaires , nous en comptons beaucoup parmi nous ; ceux-là jouissent des bienfaits de l’instruction. Mais qu’a-t-on fait des quatre cinquièmes de la population ? »

Le conférencier se plaint que, sauf de rares exceptions, les Canadiens-français n’ont que des postes subalternes, dans les bureaux des grandes compagnies de chemins de fer, de navigation, dans les grands établissements industriels et commerciaux.

« D’où vient cette situation ? »

D’une lacune dans le système d’éducation de la province de Québec. Trop de collèges classiques et pas une seule école supérieure de commerce, pas une seule école d’enseignement modèle et technique. Pourtant le commerce et la finance sont l’avenir.

Tous les pays se modernisent. La France, l’Allemagne, les États-Unis en viennent à l’instruction  pratique, plus adaptée aux exigences actuelles que les connaissances approfondies du grec et du latin.

L’instruction que l’on donnait au siècle dernier ne suffit pas actuellement. Comme nous, la France souffrait de cet état de choses. Elle a institué une commission d’enquête, étudié les systèmes des autres pays et s’est modernisée. Il ne se peut pas que dans la province de Québec on soit satisfait, quand en France on ne l’était pas avec un système cent fois supérieur aux nôtres.

Tous les pays l’un après l’autre se sont modernisés. La France compte 115 écoles supérieures, l’Allemagne 61, les États-Unis 516, la Saxe 89, la Suisse 22, la province de Québec 0.

Nous en aurons bientôt une, Espérons que d’autres suivront.

Il ne faut rien démolir, mais il faut prendre conscience de l’époque et de ses nécessités. Depuis 1867, pas un  gouvernement ne s’est occupé de l’instruction publique et, dans toutes les provinces du Canada, c’est encore Québec qui dépense le moins par tête pour l’instruction. Et, en 1908, les rapports officiels donnent une statistique stupéfiante : 514 écoles qui décrochent une note « médiocre » et 651 cette autre « mauvaise », soit 1165 écoles à condamner d’avance. […]

Dans toute la province de Québec, il n’y a pas une bibliothèque municipale gratuite, quand, aux États-Unis, il y en a une par cinq mille habitants.

M. Langlois veut l’uniformité des livres [scolaires], un salaire raisonnable pour les instituteurs et institutrices ; il se plaint de la commission irresponsable de Montréal et réclame un ministère de l’Instruction publique.

Il déplore l’apathie des pères de famille pour la grande cause de l’éducation et demande la création d’écoles rurales, d’écoles hygiéniques et le coup d’épaule de tout le monde. […]

 

La Patrie (Montréal), 28 février 1908.

O la la que nous sommes partis de loin ! Ce n’est seulement que, durant les années 1960 que nous réaliserons, avec la grande résistance des écoles privées et du clergé, une partie seulement de ce que propose ici Godfroy Langlois.

Nous en sommes encore, au 21e siècle, à débattre des sommes d’argent publiques accordées au régime privé d’éducation.

Vous trouverez la biographie de Godfroy Langlois par Patrice A. Dutil dans le Dictionnaire biographique du Canada.

Les caractères gras sont de nous.

No comments yet

Publier un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Vous pouvez utiliser des balises HTML de base dans votre commentaire.

S'abonner aux commentaires via RSS