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L’hiver, la vie en forêt (second de deux billets)

Hier, nous rejoignions les forestiers dans leur lieu de travail. Les voici dans leur demeure, leur camp.

Quelle est la maison qui pourrait rivaliser d’hospitalité avec un de nos camps de chantier ? Quel est le voyageur attardé dans les bois, qui n’a pas été l’objet d’un cordial accueil de la part de ces hommes de chantier ?

Quel est celui qui n’a pas eu le loisir de passer quelques minutes de vrai bonheur dans ces maisons de billots non équarris où les interstices sont bouchés avec de la mousse ou de l’écorce de cèdre ?

Cette habitation est d’ordinaire placée sur une éminence dominant un cours d’eau. Sur une éminence pour éviter les inondations près d’un cours d’eau, pour permettre le flottage des billots à proximité.

Maintenant voici l’heure du souper. Toute la cambuse est remplie d’un fumet qui fait venir l’eau à la bouche. Les travailleurs, gais, bruyants, fatigués et surtout affamés arrivent par petits pelotons. Les raquettes et les haches sont rangées devant la cabane, attendant le lendemain.

Le contremaître fait signe d’approcher. Après avoir mangé une bonne crêpe au lard, chacun de bourrer sa pipe en plâtre, puis de se ranger autour du feu, dans le voisinage duquel sèchent mitaines, chaussettes et tuques.

C’est l’heure solennelle. C’est le temps de conter des contes. Après quoi, nos hommes jouiront d’un repos bien mérité. Voici la journée du travailleur de nos bois.

Quand vient le dégel, quand la terre reparaît de nouveau, nos hommes retournent au village chantant d’un air ennuyeux et avec une apparence affectée de fatigue :

Quand ça vient sur le printemps

Chacun craint le mauvais temps

On est fatigué du pain

Pour du lard on n’en a point

Dans les chantiers ah ! n’hivernerons plus !

Dans les chantiers ah ! n’hivernerons plus !

 

La Patrie (Montréal), 23 janvier 1909.

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