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La parole au Sénégalais Birago Diop (1906-1989)

Birago Diop

Cet auteur, né à Dakar fut écrivain et poète. Vétérinaire de brousse, il recueillit dans l’Afrique-Occidentale française des contes et des fables, en particulier ceux du griot Amadou Koumba. Il publia un premier livre de poésie en 1960, Leurres… et Lueurs, duquel est extrait le poème suivant. Mais déjà Léopold Sédar Senghor avait retenu ce texte dans son Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache, parue d’abord en 1948.

Souffles

Écoute plus souvent

les choses que les êtres.

La voix du feu s’entend,

entends la voix de l’eau,

écoute dans le vent

le buisson en sanglots.

C’est le souffle des ancêtres…

 

Ceux qui sont morts ne sont jamais partis,

ils sont dans l’ombre qui s’éclaire

et dans l’ombre qui s’épaissit,

les morts ne sont pas sous la terre :

ils sont dans l’arbre qui frémit,

ils sont dans le bois qui gémit.

Ils sont dans l’eau qui coule,

ils sont dans l’eau qui dort,

ils sont dans la cave, ils sont dans la foule :

les morts ne sont pas morts.

 

Écoute plus souvent

les choses que les êtres.

La voix du feu s’entend,

entends la voix de l’eau,

écoute dans le vent

le buisson en sanglots.

C’est le souffle des ancêtres,

qui ne sont pas partis,

qui ne sont pas sous terre,

qui ne sont pas morts.

 

Ceux qui sont morts ne sont jamais partis,

ils sont dans le sein de la femme,

ils sont dans l’enfant qui vagit

et dans le tison qui s’enflamme.

Les morts ne sont pas sous la terre,

ils sont dans le feu qui s’éteint,

ils sont dans les herbes qui pleurent,

ils sont dans le rocher qui geint,

ils sont dans la forêt, ils sont dans la demeure :

les morts ne sont pas morts.

 

Écoute plus souvent

les choses que les êtres.

La voix du feu s’entend,

écoute la voix de l’eau,

écoute dans le vent

le buisson en sanglots.

C’est le souffle des ancêtres.

 

Extrait de l’ouvrage de Léopold Sédar Senghor, Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache de langue française, Paris, Presses universitaires de France, 1969, p. 144s.

Le croquis de Birago Diop durant les années 1970 est de Thierno I. Kane. Il apparaît sur la page Wikipédia consacrée au poète.

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