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Le droit de vote aux Néo-Zélandaises fort bien reçu

Bien avant le Canada et le Québec, le droit de vote était accordé aux femmes en Nouvelle-Zélande.

En 1893. Bilan après dix ans d’un certain Marcel Dumoret.

On sait que, depuis quelques années, depuis 1893 exactement, le droit de suffrage politique a été accordé aux femmes en Nouvelle-Zélande. L’expérience sociologique à laquelle ce pays s’est livré dure donc depuis assez longtemps pour qu’il devienne possible de noter quelques-uns des résultats qui s’en dégagent.

Un « Livre Bleu » récent a groupé des faits, des chiffres, que M. Marcel Dumoret commentait récemment dans un article de la « Nouvelle Revue ». Ces chiffres, ces faits ne sont pas dépourvus d’intérêt.

Tout d’abord, la loi qui a fait de la femme une électrice a été accueillie assez froidement par les femmes elles-mêmes. Quelques-unes d’entre elles avaient mené campagne pour obtenir ce droit. Mais leurs revendications laissaient la masse des femmes indifférentes.  Ces revendications ne furent même pas la cause principale de la réforme, due plutôt aux calculs politiques des partis organisés. Les femmes des classes aisées ou élevées commencèrent par bouder. Elles jugeaient qu’il était de mauvais ton d’user du bulletin de vote, et elles l’abandonnaient aux femmes d’ouvriers.

Celles-ci n’y tenaient peut-être pas toutes ; mais leurs maris y tenaient pour elles. Cependant, cette mauvaise humeur et cette indifférence affectée ne devaient pas durer. Les registres électoraux le prouvent.

En 1893, ils comptent 109,461 électrices inscrites et 90,290 votantes. En 1896, il y a 142,305 inscrites et 118,763 votantes. En 1899, les inscrites sont au nombre de 165,215 et les votantes au nombre de 119,150, — la progression des votantes semblent s’arrêter. Mais, bien que les statistiques des élections de 1902 ne se trouvent pas dans le Livre Bleu, on sait déjà qu’il y a eu plus d’inscrites et plus de votantes qu’en 1899. Les abstentions paraissent, en somme, très faibles.

Le vote politique est entré dans les mœurs, même dans celles des femmes du monde. Que voulez-vous ? Elles ont des passions, elles aussi. Et le droit de suffrage est une arme si commode ! On peut créer une agitation, exercer une pression, faire des démarches, avoir de l’influence — ou persuader qu’on en a — sur sa cuisinière et sur sa couturière. La passion féminine et le goût féminin de l’intrigue se trouvent très bien de ce régime. Les Néo-Zélandaises apprécient décidément le cadeau qui leur a été fait.

Le suffrage féminin ne pouvait manquer de servir les intérêts du féminisme. Le féminisme a son organe central, le « Conseil national des femmes de la Nouvelle-Zélande ». Ce Conseil prépare ses motions, qui arrivent devant le Parlement sous forme de projets de lois. Il a une importance reconnue des partis. Là se forment de futures « députées ». Car il est bien invraisemblable que les femmes pratiquent longtemps l’électorat, sans obtenir l’éligibilité. Elles l’obtiendront quelque jour et, alors, il est probable… que cela ne changera pas grand’chose à l’état des affaires.

Car c’est ici le point décisif de cette rapide enquête. La grande majorité des électrices n’est ni féministe, ni même très radicale. Les idées modérées sont celles qui prévalent.

 

Le Canada (Montréal), 8 septembre 1903.

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