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Le sort des Hurons de Lorette

Le quotidien de Québec Le Canadien reproduit cette lettre «adressée à un particulier» montréalais «par les Hurons de Lorette».

Depuis grand nombre d’années que nous travaillons pour la subsistance de nos familles, nous n’avons jamais fait aucune plainte, parce que nous étions les seuls à fabriquer ce que l’on appelle les ouvrages de sauvages, travail qui suffisait à nous faire vivre.

Mais la grande concurrence que nous rencontrons de la part des blancs, dans cette industrie qui est la nôtre, nous force maintenant à demander du secours pour nos familles.

Nous avons des enfants qu’il vaudrait beaucoup mieux garder à l’école que de les tenir à un travail ruineux, si leurs pères et mères pouvaient pourvoir à leur subsistance. Mais nous sommes obligés d’imposer à ces enfants un travail manuel qui puisse aider au soutien de la famille. Si vous venez à la jeune Lorette, vous verrez à l’ouvrage des enfants de huit à dix ans qui travaillent presque tous les jours jusqu’à minuit.

On a obtenu pour nous quarante arpents de terre dans notre seigneurie [un arpent mesure un peu moins de 60 mètres], et c’est la partie la plus pauvre de la seigneurie. Trois familles trouveraient difficilement à vivre sur cet emplacement, et nous sommes soixante à quatre-vingt familles.

Comment tous peuvent-ils vivre ?

On nous a alloué à chacun de nous un demi minot de patates [ancienne mesure équivalente à trois boisseaux] tous les printemps, et cela, en compensation de la perte de notre terre.

Autrefois, nous avions des fusils pour faire la chasse, mais à présent on nous refuse le droit de chasser.

Nous sommes actuellement réduits à la misère, notre industrie est perdue, nous n’avons pas de terre à cultiver et nous n’avons plus la permission de chasser ; voilà pourquoi nous demandons qu’on nous donne ce qui nous est dû. Nous donnons ici la date d’une seigneurie :

«Titres de Sillery accordés aux sauvages chrétiens de la Jeune Lorette, par Louis XIV, roi de France, en l’an 1651, le 13 mars, une lieu de front sur quatre de profondeur.

Et, en 1699, les Jésuites ont demandé au roi une lieue et demie de notre seigneurie, que le roi leur accorda ; par conséquent, il nous reste encore deux lieues et demie de terrain, et nous sommes les premiers propriétaires du sol, nous demandons une indemnité.»

Votre, etc.

(Signé) Stanislas Sioni.

 

Le Canadien (Québec) 17 janvier 1887.

La gravure des Hurons à Spencerwood, résidence du lieutenant-gouverneur à Sillery, apparaît dans l’hebdomadaire montréalais L’Opinion publique, le 11 mars 1880.

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