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Jeunes amoureux, attention au flirt !

les enfants qui saiment

Ne consommez pas avant le temps les fruits du mariage. Évitez la sottise de couper votre blé en herbe. Voyez ce qu’écrit le Montréalais Jacques Squire dans Le Bulletin du 5 novembre 1905.

La pratique Amérique s’est pour une fois profondément trompée, en laissant prendre à ses jeunes gens, à ses jeunes filles, la déplorable habitude du «flirt».

L’idée première en est bonne, mais théoriquement seulement.

Le jeune homme qui désire se marier est censé vouloir «connaître» celle dont il veut faire sa femme.

La jeune fille, de son côté, n’est pas fâchée d’étudier le caractère de son futur époux. Jusque là, tout est pour le mieux.

Dans la théorie, ils se fréquentent assidument, bavardent, crient, font des projets d’avenir, se découvrent leurs qualités et leurs défauts.

C’est parfait, et le «flirt» qui se bornerait à cette théorie serait la plus sûre garantie d’un complet bonheur futur.

Mais il y a loin de la théorie à la pratique, et le «flirt» perd tous ses avantages à être pratiqué.

Avec la liberté grande que les jeunes filles ont ici, d’aller et venir à leur gré, de recevoir qui bon leur semble, de n’en faire qu’à leur idée, le «flirt» prend des proportions autrement graves qu’il n’en devrait avoir.

Ce ne sont plus de gentilles causeries, d’amicaux entretiens, des soirées emplies de gaieté jeune, de douces rêveries, de charmants aveux.

L’amour, éternel petit dieu malin, pousse dans les bras l’un de l’autre les deux jeunes êtres tout vibrants de passion, et, bien vite, avec la gloutonnerie de leurs vingt ans, ils goûtent aux lèvres l’un de l’autre les joies exquises du baiser. […]

Enivrés par les menues caresses qu’ils se donnent mutuellement, les jeunes étourneaux [sic] oublient tout, pour ne penser qu’aux sensations immédiates qu’ils se procurent, en frôlements pervers, en baisers trop savants, en conversations trop hardies.

Si, dès les premiers jours de cette intimité, leur union avait lieu, le mal ne serait pas grand, mais le «flirt» s’éternise, dure des mois entiers, si bien que très peu de temps après le mariage, les jeunes époux sont las l’un de l’autre, se connaissent trop, n’ont plus rien d’inédit à se dire, et assistent, désespérés, à l’émiettement de leur passion, qui meurt pareille aux invraisemblables fleurs de serres écloses trop vite et s’étiolent bientôt, d’avoir trop vécues. […]

Les voilà profondément navrés de ce qui leur arrive, sans un instant de se rendre compte du pourquoi de leur malheur. […]

En un mot, messieurs, qui voulez récolter, ne coupez pas votre blé en herbe !

Jacques Squire.

 

L’illustration est la page couverture de l’ouvrage de l’écrivaine de Québec Claire France, en son temps immense livre pour jeunes amoureux. L’image provient du blog d’Émilie.

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