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Les belles soirées de Montréal

les belles soirees de Montreal

Allez, sortons, courons à la variété, aux couleurs. Découvrons Montréal le soir dans quelques milieux achalandés. La Patrie du 30 septembre 1905 nous y invite. Formidable texte.

Dans toute grande ville, quelque quartier, quelque rue ou bout de rue, grâce à sa situation et aux amusements que l’on y rencontre, a le don d’attirer les foules. Paris a ses grands boulevards, Saint-Pétersbourg a sa Perspective Newsky, Madrid sa Puerta del Sol, Québec sa rue Saint-Jean et Montréal ses rues Saint-Laurent et Sainte-Catherine.

Chacun de ces endroits a, naturellement, selon le pays son cachet particulier, ses attractions spéciales plus ou moins relevées; mais beaucoup et, peut-être, la majorité des gens qui les fréquentent y recherchent surtout la foule, la foule bruyante mise en belle humeur par l’éclat des lumières, le flamboiement des vitrines et sa propre animation.

La partie de la rue Saint-Laurent, qui s’étend entre les rues Craig et Sainte-Catherine, et cette dernière, de la rue Saint-Laurent à la rue Saint-Denis, sont, le soir surtout, le rendez-vous le plus populaire des Montréalais et Montréalaises avides de distraction, de petits plaisirs pas chers.

On déambule nonchalamment, admirant au passage les chapeaux nouveaux, les bijoux et les jouets; on s’arrête un peu devant la baraque où des tireurs essayent de casser, à coups de carabine, des pipes fixées sur une roue qui tourne, et l’on regarde, ébahi, une longue toile sur laquelle est peint un homme «pétrifié et vivant», tout en écoutant les airs que moud un Italien, accompagné d’un compatriote en costume national.

Mais voici quelque chose de bien plus intéressant : dans une vaste salle brillamment éclairée s’alignent des phonographes et des mutoscopes innombrables. Pour un sou, vous pouvez voir une quinzaine d’images ou entendre une chanson, un morceau d’orchestre, ou faire chanter deux serins automates, ou encore, jouissance d’un autre ordre, donner un coup de poing sur un ballon. Il ne faut vraiment pas avoir un sou dans sa poche pour s’en priver ! Dans la rue Saint-Laurent sont deux établissements remplis de ces attractions «modern style», qui se font vis-à-vis. Un autre fait florès dans la rue Sainte-Catherine, entre le théâtre Français et le théâtre des Nouveautés.

Rue Saint-Laurent, on trouve encore le musée Eden et, parfois, près du marché, «Cheap John», le célèbre camelot qu’entourent toujours de nombreux auditeurs, sans compter d’innombrables buvettes qui font des affaires d’or, puis des marchands de fruits et de crème à la glace, des débits de tabac, des magasins de nouveautés dont les richesses éblouissent les jeunes ouvrières.

Et c’est au milieu de toutes ces richesses que, chaque soir, après leur journée de travail, viennent se délasser ou s’étourdir des multitudes de jeunes ou de vieux, arpentant le trottoirs à la poursuite de plaisirs éphémères.

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