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Le poète Albert Lozeau s’en prend à Paul Verlaine

Albert Lozeau en 1909

Albert Lozeau en 1909

J’aime beaucoup les poètes Albert Lozeau et Paul Verlaine. J’ignorais tout à fait cependant que le jeune Albert n’aimait pas, mais vraiment pas du tout, Verlaine.

Jules-Paul Tardivel, le journaliste vite sur la gâchette, celui qu’en son temps certains surnommaient Pistolet, a échappé quelque part son admiration pour Verlaine, ce qui a choqué Lozeau. Le 2 mai 1902, ce dernier écrit au quotidien La Patrie.

À l’encontre de l’opinion des grands critiques français et de la plupart des lecteurs intelligents qui connaissent les poésies de Paul Verlaine, M. Tardivel déclare l’auteur de «Sagesse» le poète chrétien par excellence du XXe siècle.

C’est proprement, ou plutôt malproprement, faire l’éloge de l’immoralité.

Paul Verlaine n’a pas écrit que «Sagesse», il a publié «Fêtes galantes», «Poèmes saturniens» et «Parallèlement», etc. Dans ce dernier recueil surtout, figurent des pièces d’une immoralité nauséabonde ! et dont il est impossible de citer le moindre extrait dans les colonnes d’un journal qui respecte ses lecteurs. Après une prière à la Vierge Marie, Verlaine adresse à des femmes perdues des vers d’une obscénité révoltante.

Il est de l’école de Baudelaire, et comme lui remue à deux mains tous les immondices que son imagination exaspérée par l’absinthe et la débauche lui fait partout découvrir.

Gaston Paris, l’éminent académicien, le compare à François Villon, un poète de génie qui fut un voleur et un libertin, dit : «Verlaine fut un Villon moderne qui, comme l’ancien connut le vice, la misère et la prison, qui aime d’un amour alterné Margot et la Vierge Marie, et qui sut, comme l’ancien, conserver au milieu de son «ordure» une fleur de rare poésie».

Verlaine avait du génie, c’est incontestable, et se sentait parfois poussé vers la Croix par le repentir, mais il ne l’embrassa jamais définitivement cette Croix. François Coppée dit de lui dans la préface des poésies choisies au pauvre Lélian : «Mais Verlaine n’a pas rencontré l’expérience, la froide et sûre compagne qui nous prend rudement par le poignet et nous guide sur l’âpre chemin. Il est resté un enfant toujours.»

M. Tardivel, nous continuerons de classer Verlaine parmi les écrivains qu’il vaut mieux ne pas lire, et nous doutons qu’un seul père de famille consciencieux de ses devoirs, permette à ses enfants, sans raisons graves, la lecture des poésies de Verlaine. M. Tardivel ferait mieux de faire connaître aux lecteurs canadiens des hommes tels qu’Ernest Hella, le Père Gratry, etc., chez qui le génie s’alliait à la vertu et qui sont presque complètement ignorés ici.

ALBERT LOZEAU

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