Voir la mort de très près

Deux hommes partent à la chasse au loup-marin (nom vernaculaire donné au phoque) dans l’estuaire du fleuve Saint-Laurent. Expédition bien hasardeuse s’il en est à la mi-janvier. Le Canadien du 14 janvier 1880 raconte.

Samedi matin, deux habitants du nom de Joseph Simard et François Boulianne, tous deux pères de famille, sont partis du Pont des Isles, comté de Saguenay, en canot, pour aller à la chasse aux loups-marins.

La brise s’éleva peu après leur départ et le vent nord en augmentant, de plus en plus, les chassa au large. Emportés ainsi à la dérive, ils ont passé le samedi et le dimanche sur le fleuve sans savoir où ils aborderaient, et craignant d’être entraînés vers le Golfe et perdus ensuite sur l’Océan.

Ils ont enduré pendant ces deux jours des angoisses terribles, et la faim est venue ajouter l’aiguillon de la torture à leur pénible position. Ils étaient partis sans provisions et assez légèrement vêtus.

Dimanche soir, ils abordèrent près du Fort Pique, paroisse St-Simon [de Rimouski], côté sud, après deux jours de souffrances indicibles, et dans les plus triste état. Aujourd’hui [donc mercredi], ils sont un peu remis et sont arrivés à Lévis hier soir, par l’entremise de M. Yeo, qui les a secourus avec beaucoup de générosité.

Ils sont maintenant logés chez Albert Marquette écr, attendant qu’ils trouvent les moyens de descendre par la côte nord. Heureusement pour ces pauvres malheureux qu’ils aient rencontré des hommes aussi sympathiques que généreux dans ceux qui les ont reçu, et surtout M. Marquette si connu pour son dévouement et sa bravoure dans plusieurs circonstances, où il a sauvé la vie de plusieurs.

Ces deux naufragés rapportent que plusieurs canots sont partis en même temps qu’eux, et depuis l’on n’a aucune nouvelle. Il est à craindre qu’ils aient péri ou qu’ils aient été jetés sur des côtes désertes.

Ils sont traversés ce matin afin de trouver moyen de retourner à leurs foyers.

Cet article, précise Le Canadien, provient du journal Le Quotidien de Lévis.

À noter qu’il y a tout de même 30 kilomètres sur l’eau entre Saint-Simon de Rimouski et Les Escoumins, tout en face, sur l’autre rive, si ces deux canotiers sont partis de ce premier endroit.

La photographie d’une mère phoque et de son blanchon prise par Édouard Plante-Fréchette apparaît sur le site du journal La Presse à l’adresse suivante.