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Pour celles et ceux qui s’intéressent à l’histoire du vin

Voici, pour une des rares fois, un article sur la viticulture au Québec. Le quotidien montréalais La Patrie du 9 mai 1881 nous l’offre.

Le viticulture, disons-le tout de suite, n’est plus considérée comme un essai par nos principaux vignerons, tant le succès a été rapide depuis plusieurs années. De nouveaux vignobles ont été établis, tous les ans, dans notre province et depuis peu de temps à la Nouvelle-Écosse, sans compter ceux d’Ontario qui existent déjà depuis un grand nombre d’années. […]

Dans l’Ontario, il y a peu de grands vignobles, mais en revanche presque tous les cultivateurs réservent un petit coin de terre pour la culture de la vigne et vendent le raisin comme les autres produits sur le marché. Le seul vignoble considérable de cette province ne fournit pas son contingent de fruit au marché. Mais ses propriétaires achètent tout le raisin qu’ils peuvent trouver aux environs et se livrent à la fabrication du vin.

Dans notre province [le journaliste parle du Québec], bien que l’on ait entrepris la culture de la vigne quelques années plus tard que nos voisins d’Ontario, les progrès ont été beaucoup plus rapides et ils le sont encore aujourd’hui. Notre sol étant tout aussi propice à la culture de la vigne que celui de la province-sœur, nous devons à l’intelligence de nos premiers viticulteurs cet avancement qu’il nous plaît naturellement de signaler.

Au lieu de planter et de cultiver un nombre limité de vignes afin d’en retirer un profit immédiat, comme cela s’est fait en Ontario, on a de suite établi d’assez grands vignobles et obtenu dès les premières années des milliers de plants qui ont été vendus pour être mis en culture, et l’on a même continué à planter des boutures.

Ce système suivi d’année en année a eu, comme l’on voit, de bons résultats. On calcule maintenant que, tout en suppléant à la vente du raisin comme par le passé, le principal vignoble de la province de Québec, celui de MM. Gallagher et Gauthier, à la Pointe Claire, rapportera suffisamment de fruits l’an prochain pour permettre à ses propriétaires de fabriquer du vin. Ils n’ont pas à redouter d’insuccès; divers essais ont prouvé que le vin de la vigne Beaconsfield est excellent.

Quelques personnes prétendent encore que la vigne exposée aux rigueurs de l’hiver ne saurait vivre au Canada et que nos étés sont trop courts pour lui permettre d’atteindre un degré suffisant de maturité. À ceci l’expérience de plusieurs années oppose une dénégation formelle, et nous pourrions nous dispenser d’ajouter que, sans aucun doute, ces personnes en sont encore à supposer que la vigne d’Europe est la même que celle qui croît ici.

Nous avons au Canada des cépages bien différents de ceux d’Europe et même des États-Unis. Nos vignes comme celles de nos voisins d’outre-ligne ont l’avantage de résister beaucoup plus au froid et aux ravages des insectes que celles de n’importe quel autre pays. Cette propriété de la vigne d’Amérique est bien connue en Europe, où on importe des ceps américains en grande quantité. […]

Notre principal vignoble, celui de la Pointe Claire, contient aujourd’hui plus de trente acres de vignes montées sur des perches ou des treillages. On calcule que l’an prochain, ce vignoble rapportera cent vingt tonneaux de raisin. Les propriétaires planteront cette année trois cents boutures. […]

La destruction rapide des vignobles en Europe par le phylloxera aura certainement pour effet de porter cette industrie vers le nouveau continent et il nous appartient de recueillir notre part des bénéfices.

Que nos cultivateurs consacrent donc une partie plus ou moins grande de leurs terres à la culture de la vigne et qu’ils soient sûrs d’être bien rémunérés pour leur travail.

Nous recommandons, en terminant, à ceux qui ont recouvert leurs vignes pour l’hiver de les découvrir immédiatement, s’ils ne l’ont pas déjà fait.

 

La gravure ci-haut est parue dans L’Opinion publique du 14 août 1879. On la retrouve sur le site de Bibliothèque et Archives nationales du Québec, au descripteur «Vignobles».

4 commentaires Publier un commentaire
  1. Esther #

    Suite à cette lecture très intéressante, je me suis demandé ce qu’il était advenu de ces vignes… Un certain élément de réponse se trouve ici, si cela peut servir à d’autres curieux:
    http://books.google.ca/books?id=q-4BCfSPzogC&pg=PA22&lpg=PA22&dq=vignoble+Beaconsfield&source=bl&ots=EpZwEAQdoj&sig=yfziCl3DYD-ME9n1C1AKB0VwGHI&hl=fr&sa=X&ei=A_hgU-vvHs-VyASDhYDQDQ&ved=0CFEQ6AEwBA#v=onepage&q=vignoble%20Beaconsfield&f=false

    30 avril 2014
  2. Jean Provencher #

    Merci, chère Esther. On fait de la route, on fait de la route.

    30 avril 2014
  3. François Roberge #

    Le vignoble de Beaconsfield, as été construit ou se retrouve présentement le yacht club de Beaconsfield, on retrouve encore la maison.

    9 mai 2014
  4. Jean Provencher #

    Merci beaucoup, Monsieur Roberge.

    9 mai 2014

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